Médecine, souvenirs d'une infiltrée

 De la médecine, analyse et souvenirs d'une ''infiltrée'' en 67. Réflexions.

---- Isabelle, la question, en amont est ''pourquoi ont-ils 'fait' médecine ?'' Ayant eu contact à la fac avec beaucoup et très svt*, aux intercours, à la cafet : la réponse est MAJORITAIREMENT '' FRIC ou PRESTIGE'', avec plans de carrière stupéfiants chez des jeunes de mon âge, 20-25 ans. Comme il y avait alors bcp plus de mecs que de femmes, s'ajoutaient des projets plus perso : ''moi je vais me fixer à à Thas sur Somme ''... ''un bled pourri ! '' ... ''oui mais le père de Marie-Soph y est installé depuis des lustres et va se retirer à Marbella, rhumatologie, ça marche fort là bas, ya plein de vieux friqués et en plus son cousin est ortho prothésiste tu vois''... ''Ouais mais t'as pas peur au cas où ''... ''suffit d'un contrat bien serré''  ...  En philo on parlait de Heidegger. 

* très fortement paludéen, mon copain, assommé de fièvre ne pouvait parfois aller en cours (la quinine ne marchait pas toujours) et pour certains (en amphi) j'y allais à sa place, ce qui m'a donné une juste et pénible image de la médecine (déjà), un exemple d'emblée : en introduction de cours, un prof demandait si quelqu'un pouvait se charger de prendre des notes au calque pour les étudiants qui devaient bosser : PERSONNE sur plus de 200 n'a levé le doigt ; en philo, pour la même requête, sur 72, une véritable forêt s'est levée.   

--- Renée, vous n'avez plus foi en la médecine ? Normal, mais svt on se 'soigne' soi même, sauf qu'on L'IGNORE. Un phénomène rare qui évoque l'emprise de la religion : la mainmise ou main basse* du soin et même du diagnostic** (voire du titre de ''docteur''). Or pour connaître les causes d'une pathologie (les médecins ne les cherchent même pas, pas le temps) il faut questionner, écouter, réfléchir ensuite, intuitionner, recouper, en parler à d'autres... ça prend du temps, et time is monay. Par le jeu des pubs qui les innondent, les médecins apprennent ceci : symptôme => médoc.. Quant à la cause ... pff. Donc le symptôme AVERTISSEUR disparaît mais la cause demeure et s'aggrave car s'ajoutent les effets secondaires du médoc, il y en a tjrs, qui brouillent tout... si bien qu'on a 2 pathologies ou plus au lieu d'une, et parfois plus graves, qu'à cela ne tienne, à nouveau médoc et re et re... on en meurt parfois. 

De plus, les corps, à ''l'intérieur'', diffèrent autant que les visages et UNIFORMISATION qui est de règle réduit le patient à un shème qui ne lui correspond pas d'où erreur, parfois dranatique (le nombre de gens opérés d'une ''fracture'' du poignet qui n'était qu'un surnuméraire foulé... les médecins gardent de le dire.)

*Luc Boltanski, ''prime éducation et morale de classe''

** rares sont les profs qui osent dire à des étudiants ''écoutez toujours la mère, en général, elle a raison.''