Une petite fille perdue

 Une petite fille perdue dans les bois, familles dysfonctionnante

Pour une petite fille perdue dans le bois, remember me !

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Note : une lectrice me fait remarquer que le syndrome de Stockholm est à la base de toute la société et permet en effet que "les gens se battent pour leur esclavage comme s'il s'agissait de leur liberté" (Spinoza). Cela se voit à tous les niveaux,parfois simplement par une passivité étonnante devant des dols aussi évidents qu'évitables et lourds de conséquences (lien avec le cas "Jacky". Le fait est que le "caterpilleur", qui semble inexpugnable, droit sur son engin, viril mais -faussement- serviable, il lui arrache trois accols mais lui "offre" un chemin -qui existait déjà!-  parfois fascine et terrorise sa victime. Cela vaut pour Jacky, un poids lourd pourtant ! -mais sans la connotation sexuelle- comme pour les autres cas qui suivent.)
Il arrive que ceux ou celles ayant subi -ou été témoins- dans leur enfance d'actes gravissimes pratiquent un déni qui va jusqu'à la solidarité pleine et entière envers le doleur, puis, dans la foulée envers tous au point extrême D'ÉREINTER A PRIORI TOUTES LES VICTIMES, telles les femmes battues agonissant les féministes qui les défendent, elles et d'autres. C'est le syndrome de Stockholm, déroutant mais fréquent lorsque l'agresseur, un proche -c'est la majorité des cas- demeure malgré tout aimé. La "loyauté" envers un être cher même de ce type devient traîtrise envers soi, envers ses autres victimes etensuite envers toutes. Exemple.

 Léna

Léna [milieu petit-bourgeois intello] a subi à 16 ans une agression sexuelle de la part d'un proche, pas un viol, unique et jamais réitérée, un quart d'heure de folie ou de fureur inexplicables dans la vie exemplaire d'un parfait qui se termina à 95 ans, insoupçonnable et apprécié de tous. Pas vraiment soutenue cependant -on l'a faite taire- elle en garde quelques séquelles. Elle est comme forgée par ce drame et lors de stress, "cela" revient confusément mais comme souvent les agressés sexuels rescapés, elle fait preuve d'une force hors-norme associée à une certaine fragilité.

Elle n'en a ensuite plus jamais parlé, même pas à son psy, s'efforçant d'oublier et a oublié. Pas tout à fait pourtant et c'est pire, cela existe en elle comme toile de fond, l'émotion a pris le relai du logos, et elle réagit parfois démesurément même dansdes situations anodines. A la faveur d'un événement sans rapport, longtemps après,"cela" est revenu mais cette fois avec une telle force qu'elle a enfin fait son "coming out". Encore avait-elle brièvement mentionné autrefois l' "anecdote", en l'édulcorant, une seule fois, à son compagnon, comme on avoue un crime à qui se propose de partager votre vie, ayant croyait-elle, surmonté le bouleversement qu'un tel acte même unique et "a minima" génère à vie..

Elle parle donc mais cette fois ouvertement, publiquement, d'abord à des groupes de femmes, ensuite à des amis en nombre ahuris, et enfin à un très proche, David.Elle tente même d'exiger de son agresseur âgé une explication écrite -elle n'a pas le courage de l'affronter de face- il est auteur.. et n'obtient que dix pages qui éludent habilement, -à demi car il ne nie pas- la question pour s'attacher à des détails sans intérêt. Elle n'a pas la force d'en exiger davantage..

David, l'aveu et le résultat : une lettre d'insultes

Mais à David, son frère putatif, elle écrit. Non pas pour dénoncer a priori son agresseur mais seulement, au sujet d'une vague dispute qui les a opposés, afin d'expliquer sa violence, pour se faire pardonner en quelque sorte. Il est un fait que les agressés sexuels ont souvent des réactions hard inattendues qu'ils ne peuvent expliquer aux autres qu'en faisant mention de leur équation personnelle, ce qui est la plupart du temps impossible.. et qui les isole davantage; une de leurs séquelles et non des moindres.

Le résultat est immédiat, UNE LETTRE D'INSULTES, notons le, nullement à propos de la dispute [le seul sujet] mais seulement de cet aveu connexe sur lequel il s'appuie pour la démolir davantage. Il se sert donc contre elle de cette douloureuse confessionpour enfoncer encore le clou qu'elle a imprudemment planté: elle est une "semeuse de merde jalouse et aigrie par une vie affective anéantie -elle vient de divorcer- reliée à son détestable caractère, elle ignore tout de ce qu'est l'Amour et ne l'a jamais connu etc etc.." trois pages maladroites parsemées de curieuses majuscules, suintant d'une inextinguible haine; elle rompt sans même exiger d'explications. Les agressés sexuels ont une bonne résistance aux rebuffades et aux cruautés mais, se sachant vulnérables, ils choisissent souvent la fuite sans retour : une résistance par le vide.. Témoignant parfois d'une indifférence voire d'un cynisme qui les fait méjuger, ils peuvent aussi s'effondrer d'un coup... et sachantd'expérience que les choses ne sont pas ce qu'elles sont censées être dans les discours -notamment scolaires-, isolés ou se croyant tels, plus lucides que d'autres, ils tendent à obérer leurs affects. Des "forts" croit-on, et c'est vrai, mais forts parce que fragiles. Bref, elle n'y songe plus. Le trait est tiré sur le chapitre-David.
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Quatre ans plus tard, coup de théâtre, à la suite d'un décès qui les a obligés à se revoir, à l'occasion d'une réflexion de celui-ci ["pourquoi ne m'as-tu pas appelé lorsque tu as trouvé ton père mort?".. (!!?) "Après ce que tu m'as écrit, tu plaisantes?"] elle apprend qu'il ignore tout de la lettre... qui provient, non de lui qui pourtant l'a "signée" mais de sa femme.. qui a signé pour lui -une double signature-... et que de surcroît il n'a jamais eu celle de Léna -adressée à lui seul- escamotée par Adèle.. Elle lui avait seulement dit que ''Léna lui avait écrit" [sous entendu à elleseule] et aussi surprenant que cela paraisse, il n'avait demandé ni à lire [puisque ça ne lui était pas destiné!] ni n'avait interrogé sa femme sur ce qui l'avait mise en fureur.. pas plus qu'il n'avait questionné Léna. [Travailleur acharné, il enchaînait à l'époque sans un instant de répit plusieurs travaux pénibles, constructions, mécanique.. -Léna idem- : un couple où on parle peu voire pas.]

Adèle, un kaléidoscope

Adèle est un cas. Issue d'une famille immigrée culturellement défavorisée dont, intelligente et ambitieuse, elle est une rescapée, chaleureuse, "nature", mais sans états d'âmes, elle est, malgré son aimable allure, un kaléidoscope, à la fois candide et retorse, directe, brute de décoffrage et insinuante, généreuse, indéfectiblement loyale envers certains et impitoyable envers d'autres. Or, il se trouve qu'une rumeur persistante parle d'un inceste entre son père et sa sœur aînée qui, mise à la porte lorsqu'elle se trouva enceinte (!) disparut alors nuit et brouillard avec le bébé. Adèle a toujours occulté cet épisode -bien que son milieu ait rendu le drame plus ou moins public-; la seule fois où elle évoqua allusivement le sujet, [sans la moindre mention de l'épisode du viol même pour le nier] ce fut fortement à charge contre sa sœur, une écervelée, le mot "traînée" étant largement sous entendu, qui avait eu des "problèmes" (?!), était partie au grand désespoir de tous et qu'on ne parvenait pas à retrouver, pas plus que la petite Anita abandonnée à la DDASS, ce qui peinait tant sa mère etc etc... [ce dernier point s'avéra aussitôt une contre-vérité: Léna entreprit tout de suite de la retrouver, y parvint facilement -de son côté la petite cherchait désespérément sa mère- sans autre résultat qu'un rejet sans appel de sa "famille"; elle avait 12 ans, fuguait sans cesse, son mal-être était poignant mais les grand-parents qui en fait n'avaient jamais bougé, lorsqu'il fut question d'une simple visite de retrouvailles, se trouvèrent soudain des obligations urgentes ailleurs.. et on n'en parla plus.. pendant cinq ans (!) le temps passe vite!]
ligations urgentes ailleurs.. et on n'en parla plus.. pendant cinq ans (!) le temps passe vite!]

Anita, le sacrifice d'Iphigénie

Mais voilà qu'à 17 ans, la jeune fille surgit telle une Parque des Enfers. La DDASS cette fois l'avait imposé, plus moyen de se défiler. [Selon l'indécenteinversion des responsabilités dont elle avait le don, Adèle protesta fort contre la terrible incompétence de l'administration, un scandale, "ils" les obligeaient à reprendre -en fait seulement à revoir- une gamine qu'"ils" avaientabandonnée (!) "bousillée" etc..] Et le témoignage à charge de la jeune fille contre son grand-père et père disait-elle fut accablant, elle assurait même avoir été témoinde ses relations avec sa mère, bien après qu'elle fût chassée [il la voyait en cachette.] Pire, elle affirma ensuite que récemment, au cours de ses rares visites, il avait tenté envers elle aussi des gestes non équivoques (!) Un détail tendait à corroborer au moins sa paternité, elle était son clone. Pour le reste, comme toujoursen pareil cas, il n'y avait que sa parole. Nous y reviendrons.

Les liaisons dangereuses

Adèle avait donc signé à la place de David et Léna avait réagi comme prévu par une rupture en silence, un coup bien calculé de la part de qui savait comment fonctionnent les agressés sexuels intrafamiliaux. Ici, Adèle est un syndrome de Stockholm par procuration : elle fait corps non seulement avec un doleur jamais incriminé mais a priori avec TOUS, fustigeant toutes leurs victimes. Elle prend par principe définitivement le parti du bourreau contre sa proie, y compris, comme les syndromes de Stockholm, lorsqu'elle est cette proie et plus encore s'il s'agit d'une autre. Des bénéfices secondaires? Pas toujours, si ce n'est ici de faire taire les bruits persistants sur sa lignée [et sur elle] et de présenter l'image convenue obsessionnellement appétée d'une respectable bourgeoise au moralisme sans faille. Mais parfois, les anti-bénéfices montrent qu'un syndrome de Stockholm n'est pas opportuniste ou plus exactement opportuniste à rebours de ses intérêts. Pour lui, une injustice vaut mieux qu'un désordre : c'est un manipulé qui manipule, un tueur sans gages plus dur encore que son maître envers ses victimes devenues siennes.

Dimitri

Le fils de Léna qui trouva par hasard la lettre pleine d'épluchures prête à partir à la poubelle, étonné d'y voir le nom de sa mère, la lut à voix haute et s'amusa à la prendre à rebours. "Mais elle t'adore" s'exclama-t-il en rigolant. Résultat stupéfiant en effet: Léna qui n'avait pas eu le courage de poursuivre jusqu'au bout éclata elle aussi de rire. C'était un transfert presque parfait, une inversion totale des deux personnages. Adèle était Léna et faisait endosser à celle-ci son propre personnage. La fustigeant cruellement sur quelques points de détails.. qui avaient la particularité de lui être applicables et pas à sa victime, elle parlait donc d'elle-même, avec quelques envolées saugrenues hors-sujet: "Nous Nous Aimons Sincèrement plus que Tout et sans Aucune autre motivation que l'Amour, absolument Rien d'autre -disait-elle et faisait-elle dire à David- ce que tu ne peux pas comprendre car tu n'as jamais connu l'Amour.. Nous, nous ne nous Cachons rien, tout dans notre Couple est Limpide comme l'Eau etc..." profession de foi qui par la suite résonna de manière hilarante. [Or jamais Léna n'avait dit le contraire et cela n'avait rien à voir.] David pouvait-il avoir écrit ceci? Dimitri doutait, Léna pensait qu'il s'agissait d'une œuvrecommune mais dans tous les cas, le considérait comme responsable puisqu'il avait signé.

En fait tout le texte, hors sujet, visiblement mitonné pour l'anéantir et mettre un point final à leur relation, était à lire exactement à l'envers.. avec quelques pics cocasses qu'elle n'avait pas lus... Par exemple le couple Adèle-David, incroyablement taiseux, fondé sur d'invraisemblables non-dits, s'opposait à celui de Léna, très parleur, explosif mais hautement transparent ; la perverse c'était Adèle et non Léna, et la jalousie provenait d'elle (Léna ayant, selon les critères couramment admis, mieux "réussi" socialement qu'elle bien qu'à elle aussi les études -universitaires- eussent au départ été "interdites".. mais elle passa outre) et non l'inverse etc.. D'autre part, le déni vigoureux et naïf d'une accusation qui ne lui avait jamais été portée était fortement suspect. Le principe du "crayon dans le poche"? [l'enfant qui, déniant avec une précision révélatrice un forfait que personne ne songeait à lui imputer, s'en accuse: "non, je l'ai pas mangé et j'ai pas caché les bouts dans ma poche" s'exclame-t-il par exemple alors que sa mère recompte les pastels qu'il dévoreparfois.. et pense que peut-être la boîte était incomplète!] Un syndrome de Stockholm donc, banal quoique compliqué, étendu, quasi obsessionnel.

Le crayon dans la poche

Toute victime qui lève la tête l'offense car elle risque de l'entraîner. Et victime, le syndrome de Stockholm refuse de l'être, refuse même que "cela" puisse exister. Malheur à qui dit le contraire. Si Léna parle publiquement, même d'une agression mineure, créant malgré tout le scandale [ce ne fut pas le cas mais Adèle vit avec cette obsession] autour du cercle familial nickel que cette alliée a intégré au point de ne plus jamais mentionner, tant pour elle que pour son fils, son nom initial ni son origine, elle risque d'attirer l'attention sur son propre cas, sans commune mesure etdéjà pointé dans le village. Exit celle par qui le scandale risque d'arriver et par tous les moyens, l'idéal étant de faire porter à David le poids de la charge. Notons que, comme Œdipe, c'est en voulant fuir son destin qu'elle le rencontre: se défaussant d'un seul coup -un revers stupéfiant- du personnage soigneusement ciselé depuis des lustres pour en révéler un diamétralement opposé, sordide [escamotage de la lettre, signature à la place de David, maladresse et cruauté de l'"argumentaire"..] elle se dénonçait : oui, c'était bien le symptôme du crayon dans la poche (1). Oui, isoler David -surtout de Léna, son soutien éidétique- était pour elle fondamental [leur couple allant mal à ce moment là, Léna représentait un double danger : lui faire perdre la face en révélant le mensonge du roman familial mitonné contre Anita et sa mère si elle parlait.. et peut-être, renforcer David, lui donner le courage de se révolter.] Or c'est justement son obsession qui l'amena à se dévoiler; pathétique,vivant sur un fil, au bord d'un gouffre -comme souvent les agressés sexuels-, pour l'éviter, elle s'y précipite tête première.

Car Adèle, comme beaucoup de borderlines sociauxdésavoués qui se sont élevés avec âpreté et talent surjoue naïvement son personnage ; croyant hisser haut sa voilure,elle l'affale.. si bien qu'elle porte à sourire, agace ou exaspère selon les cas. Un syndrome de Stockholm est souvent englué dans des contradictions burlesques -c'estsa situation, folle, qui l'y conduit- et ce faisant, il se trahit. Surtout s'il ne possède pas les codes sociaux. Par exemple lorsqu'Anita refusa de retourner dans sa famille [où, avait-elle dit à Léna et à d'autres, son grand-père et père (!) tentait de lui faire subir des attouchements] Adèle l'admonesta sur le mode de la contre-vérité vertueuse, bouffonne et indécente,faisant endosser à la jeune fille le rôle de l' "adolescente égoïste qui abandonnait (!) des grand-parents âgés pour aller picoler avec des drogués".. la tirade s'achevant par un finale indigné "on te doit rien, si t'es pas contente, la porte est grande ouverte.." alors que c'est Anita qui, laissée sur le bord du chemin par un clan en cours d'ascension qu'elle gênait s'était logiquement liée à d'autres exclus comme elle soi-disant peu présentables (?) Les syndromes de Stockholm pratiquant déni de la réalité, transfert et vérité inversée sont parfois, comme les schizophrènes dont ils se rapprochent, hilarants d'aplomb, (devant un exhibitionniste en pleine action ils seraient capables de s'exclamer sans broncher "voyez combien il est pudique, je vous l'avais bien dit") ... pratiquant un bourrage de crâne violent, loufoque maisdestructeur et provocateur .. efficace pourtant parfois, surtout s'ils s'adressent à un enfant ; ils peuvent déstabiliser, rendre littéralement fou. [Il arrive aussi qu'ils fassent peur ou que leur face honorable qui n'est pas tout à fait une pose ou disons une pose actée, profitable au groupe, les préserve de tout affrontement. Des parfaits: c'est ainsi qu'ils se présentent volontiers.. et que fut qualifiée Adèle par une psy (!)qui ne voyait qu'un côté d'elle, comme Léna autrefois (elle soigna avec un dévouement exemplaire son père (!) et sa mère -mais sans le laisser ignorer!-)]

Un jour cependant, il y eut un couac, une réponse cinglante exaspérée de celle-ci devant une charge de trop contre Anita, toujours sur le mode père-noble qui était propre à Adèle ["on sait pas pourquoi cette gamine refuse à toutes forces d'aller chez ses grand-parents; même lorsqu'on y va, elle veut pas venir et reste ici, ça les peine tellement à leur âge" etc etc..] Ce fut la goutte d'eau. Léna, qui avait accepté, mal,qu'après qu'elle ait cherché et trouvé une enfant "perdue", le résultat fût un rejet [pire encore car cette fois non justifié par la détresse sociale -et, pour sa mère, le désir sans doute de la protéger de ses macs] Léna, exaspérée, coupa net : "Elle a peut-être ses raisons".. et là, ô stupeur, la réplique d'Adèle claqua immédiatement: "C'est pas vrai!" (!) dévoilant, candide que malgré ses discours torturés hypocritement interrogatifs, elle n'ignorait rien des accusations portées par la jeune fille contre son grand-père. Vraies? fausses? La question ici n'est pas là. Nous y reviendrons.

L'engrenage de la perversion

Notons que les syndromes de Stockholm, lorsqu'ils sont pervers -et ils le sont presque toujours puisqu'ils épousent fait et cause les dénis des doleurs- tendent à recruter, lançant contre leurs victimes des piques de plus en plus aiguës devant un/des tiers -jusqu'à ce que le fil casse-. Ils tissent leur toile. Avertis, ils sauront jusqu'où ils pourront aller. Léna en fit les frais sans le savoir : étant la seule à pouvoir démentir le roman familial [la petite fille engloutie par un système impitoyable de fonctionnaires odieux et incompétents qui avaient refusé de la rendre à une famille démunie incapable de se battre pour faire valoir ses droits etc.. etc..] elle risquait de faire perdre la face à Adèle si elle parlait. Ce danger, il fallait s'en prévenir par avance. En public, elle avait coutume de lancer quelques épigrammes fielleux contreLéna sur le mode de la connivence, à la fois insidieux, rigolard et nature qu'elle affectionnait, y compris auprès de gens que celle-ci ne connaissait pas, sous-entendant qu'il fallait se méfier de ses dires ["avec elle on sait bien ce que c'est (?) il faut toujours en prendre et en laisser"..] menteuse n'étant pas explicitement formulé mais insinué.. sans manquer d'ajouter qu'elle l'aimait beaucoup tout de même. Le fait est pourtant que Léna s'était tue sur ce second rejet d'Anita, malgré sa déception et les propos à tiroirs des personnels de la DDASS ["une affaire compliquée.. ne vous attendez pas à des miracles.. il peut y avoir refus de la part de la petite.. ce n'est pas comme dans les histoires au cinéma.. il y a parfois des éléments qu'on ne maîtrise pas.. que vous ignorez.. il faut que cela passe d'abord par d'autres, pas par les grand-parents" (?).. Léna s'était demandé si la mère d'Anita n'aurait pas exigé que sa fille ne soit pas mise en relation avec eux : était-ce pour lui demander son accord qu'un délai de 10 jours avait été imposé avant qu'on ne lui indiquât l'endroit où vivait l'enfant? Suivait-elle sa fille de loin? Avait-elle été approchée lorsque la petite les harcela pour la retrouver? Était-ce pour la protéger de ses macs qu'elle n'avait pas donné suite? Ou la protéger.. d'autres? ce n'était pas tout à fait clair, vaguement sous-entendu mais Léna, trop contente de toucher au but, n'en avait pas demandé davantage]. Et ce furent justement ces détractionsinsistantes d'Adèle contre elle (en totale opposition avec son attitude face à face), rapportées par des amis mal à l'aise, (surtout l'un d'entre eux qu'elle avait elle-même mis en relation avec Adèle!!) qui l'interpellèrent. Pourquoi? La réponse était évidente. Elle n'en tint pas compte. [Aider quelqu'un, parfois, c'est s'en faire un ennemi parce qu'on a pénétré par la force des choses trop loin dans son intimité.. et franchi la ligne rouge des enfers.]

Familles d'accueil de la DDASS, non ce n'est pas comme à la télé. Voir http://lessurvivantsdeladdass.wifeo.com
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Anita disait-elle vrai? Il est sûr qu'elle haïssait sa famille pour avoir jeté sa mère enceinte à la rue et l'avoir vouée à des errances dramatiques, une famille qui, malgré une remarquable ascension sociale [signe qu'ils étaient loin d'être aussi perdus qu'ils le prétendaient] l'avait sans appel rayée de l'arbre généalogique. Était-ellerevenue régler des comptes au couteau avec ceux qui avaient conduit sa mère à la prostitution et elle à la DDASS, rejetée deux, puis trois fois, à la naissance, à 12 ans puis à 17? Léna étant venue la voir dans la famille où elle vivait, tout proche, pour elle, le mythe de l'enfant perdue arrachée aux siens avait forcément volé en éclats. Elle avait été bouleversée à cette occasion d'observer en direct l'incroyable différence de traitement dans ce "lieu de vie psy" -pourtant considéré comme "top"- entre les enfants de la famille et ceux -il y en avait deux- de la DDASS... ainsi que par l'état de saleté innommable de la petite, jolie pourtant, qui pour s'en excuser, expliqua qu'elle travaillait le cuir et les teintures, comme ses hôtes... Elle se plaignit d'eux qui selon elle ne la nourrissaient pas suffisamment -le fait est qu'elle était très maigre-.. mais Léna, qui interrogea immédiatement la mère d'accueil, une jeune femme cultivée, d'apparence agréable, aimable et diserte -style hippie retour à la terre- se vit opposer un catégorique démenti, en rigolant. Non, il n'avait jamais été question de jeûne.. ou plutôt si, mais c'était elle qui avait jeûné pour éliminer les toxines accumulées par trop de stress etc.. pas les enfants. Le fait que ce soir-là le repas eût été plus que copieux n'était évidemment pas significatif. Anita précisa tout de même en aparté à Léna qu'elle leur "rapportait" le prix d'une journée d'hôpital, 250 Fr (?), un revenu plus que confortable compte tenu qu'ils avaient deux "cas difficiles", un éducateur presqu'à demeure et que les enfants bossaient avec eux, fût-ce maladroitement, fût-ce pour apprendre un métier -dans la pratique, lorsque Léna la vit à l'ouvrage, Anita ne faisait que des bords, la partie fastidieuse du travail..- (Que l'éducateur eût été un homme -amené à rester avec elle le soir dans sa chambre..- étonna Léna, mais apparemment personne n'y voyait de mal.) A aucun moment, la mère d'accueil ne demanda à la petite de se laver les mains, même pas avant le repas -elle semblait ne pas la regarder- et si elle fut servie exactement comme ses enfants, ce fut en silence.. tandis qu'elle ne cessait de babiller-gâtouiller avec eux. Sa froideur et son indifférence évoquaient davantage un serveur stylé de restaurant devant un client qu'une hôtesse aimante. Elle ne vérifia même pas si la petite avait ou non mangé, ni ne lui demanda si elle voulait du rab tandis qu'elle insistait pour que ses enfants terminent, enlevant un morceau, rajoutant un autre etc.. Malaise. Note : Anita, adulte avant l'heure, qui faisait chorus,surveillant les "enfants" et les encourageant à manger, ne pointa pas ce comportement qui avait choqué Léna (l'habitude?) et affirma se trouver malgré tout relativement bien dans cette famille, meilleure que celles qu'elle avait connues jusqu'alors (!) : dans d'autres d'où elle avait fugué, elle avait été maltraitée et notamment agressée sexuellement.. sans aucune réaction de la part de la DDASS, personne ne venant (à ce moment-là) jamais contrôler les accueillants, souvent isolés à la campagne. Puis, considérée comme un "cas psy", elle avait été placée en foyer -où elle se plaisait plus que dans ces familles, on le conçoit!- et ensuite dans ce "lieu de vie" spécial, isolé en montagne dont les hôtes, mieux rémunérés, ne pensaient certes disait-elle qu'à l'argent qu'elle leur rapportait mais ne l'agressaient pas. Un job rémunérateur, pratique, qu'ils accomplissaient avec conscience (?) mais en s'y investissant le moins possible. La question de la nourriture ne fut jamais réglée. [Léna -qui n'était là qu'en vacances- repartit à Paris, avalée par le travail, ses propres enfants -des soucis graves pour l'un d'entre eux- et surtout croyant le relai pris. Il ne le fut qu'a minima.. -voire ce fut pire sans qu'elle ne le sache- et le second rejet s'ensuivit. Anita ne répondit jamais à ses lettres. Avec le recul, on peut se demander si elle les avait eues.]

-des soucis graves pour l'un d'entre eux- et surtout croyant le relai pris. Il ne le fut qu'a minima.. -voire ce fut pire sans qu'elle ne le sache- et le second rejet s'ensuivit. Anita ne répondit jamais à ses lettres. Avec le recul, on peut se demander si elle les avait eues.]

La vérité et la lâcheté de tous


Une affaire terrible et complexe : Anita disait-elle vrai pour ce qui est de l'inceste, de sa conception et des gestes de son grand père? L'entourage se départageait, la gêne était palpable; ne pas la croire était la solution de facilité : Adèle, posant en porte-fanion haut en couleur de la moralité de tous, pesait son poids tandis que la jeune fille était vouée à repartir à jamais -c'est bien ce qui se passa-, personne parmi ses proches ne semblant la retenir (!) C'était simple: TOUT LE GROUPE FAMILIAL FONCTIONNAIT SI ANITA MENTAIT. MAIS DANS LE CAS INVERSE, IL ÉCLATAIT. Car Adèle par ailleurs se comportait parfaitement en tant qu'épouse, bru, nièce; dévouée -mis à part quelques couacs en dessous qu'elle voulait discrets, par exemple la lettre- elle faisait même preuve d'une souplesse d'échine inattendue vis à vis de la chef du clan, la mère de Léna, qui ne l'appréciait guère. [Il est possible que sa tentative autrefois -aboutie- de séduction envers Léna ait eu pour but de faire céder la Sultane : cela fonctionna à demi. Notons que c'est aussi après la mort de celle-ci qu'Adèle opéra un revirement à cent quatre vingt degrés envers Léna devenue inutile et même dangereuse.. une mort suivie peu après d'une joyeuse garden party qu'elle donna dans son jardin jouxtant celui de Léna.. qui ne perdit rien cette nuit-là deséclats de rire, bruits de verres etc.. Une vengeance par transfert -sur une femme qui l'avait soutenue contre la morte.. à qui elle était en réalité adressée- toujours selon le même principe, se venger, si possible en nombre -Léna en voulut plus ou moins àtous les bruyants convives- et par séide/s interposé/s, fût-ce vingt ans après,lorsque l'occasion se présenterait, sur le maillon faible : qu'il fût innocent voire un allié étant sans importance.]

Revenons à la vérité: un peu de lâcheté sans doute présidait à ces "doutes" au sujet des dires d'Anita; une famille fonctionne comme un corps et de celui-ci Adèle était ou se disait le cœur; prêter foi aux accusations d'Anita eût été destructeur pour cette branche reliée à Adèle. La branche aînée, celle de Léna, embarrassée, fit un moyen terme, les relations entre les deux lignées se distancièrent, ce squelette dans le placard, ils ne voulait pas en être responsables mais se positionner trop hard était peut-être injuste, ils ne pouvaient être sûrs de rien [soit, mais ce dont ils étaient sûrseût dû être suffisant]. Bien que la jeune fille vînt souvent chez eux [un milieu "neutre" qu'elle ne pouvait incriminer en rien et où elle se sentait bien et vice versa] eux aussi n'en parlèrent presque plus. C'est ainsi que les relations perdurèrent a minima entre les deux branches de la famille.. et même inclurent petit à petit les parents d'Adèleque celle-ci avait réussi à imposer par le biais de son fils, anniversaires, fêtes etc...

Indices

La parole de l'une contre la parole de l'autre. Is fecit cui prodest. La passion d'Adèle pour le conformisme social, même au prix des divers saccages dont elle avait parsemé sa route la rendait éminemment suspecte; mais la haine d'Anita envers sa famille, également. Certes, Adèle se laissait parfois aller à certaines naïves transformations de la vérité, des exagérations facilement repérables et toujours repérées confinant à de la mythomanie, notons-le, essentiellement pour vanter son fils.. travers banal de toute mère excessive -Léna l'appelait ''Mama Roma''- dont on souriait avec indulgence.. Mais cela ne signifiait pas pour autant qu'Anita dise vrai.Le seul fait sûr était le rejet de sa mère enceinte, sans diplômes [ses parents,malgré l'insistance d'instituteurs* navrés, ayant catégoriquement refusé qu'Adèle -la plus douée des deux sœurs.. du moins selon elle-même (!)- étudiât, il est probable qu'ils en avaient agi de même envers l'aînée] un argument en faveur d'Anita. L'autre -mais il vint après coup- était évidemment la lettre, Adèle, la dévouée pouvait donc se révéler une Merteuil. Tout fut pourtant -à peu près- comme avant. Une précision:ces gens qui se sont tus avaient dans le passé donné des preuves indiscutables de leur engagement et de leur courage (!)  Est-il plus facile de lutter contre l'occupant nazi que de faire un signalement de maltraitance auprès d'un commissariat de police? Il faut le croire (!)

Conclusion, la loi du plus fort

En cas d'agression sexuelle intra familiale contre un "enfant" -ou un mineur- la disproportion de forces écrasante entre le doleur et la victime fait que le doute profite toujours au plus fort: Anita partit à jamais; Adèle demeura, de plus en plus puissante, utile, sûre d'elle et de ses dénis, ses parents de même, devenus prospères et le roman fut réédité.. Le mythe -cependant démenti- remplaça le réel. 

Pour elle, le danger était écarté.. à condition d'écarter Anita (puis Léna mais là, c'était une autre paire de manches et il fallait patienter). Ce fut fait. Facile, les agressés partent toujours. Exit Anita, tapis rouge pour le doleur [un homme fruste, analphabète, gros travailleur, impeccable ouvrier, vénérant et vénéré de son patron,généreux, économe et toujours plaisant].. et il n'y eut plus de ça de là que de vagues allusions outrées -mais plus discrètes, du moins devant Léna- à "cette gamine perturbée" devenue "délinquante irrécupérable" [cela aussi était faux et une contre-vérité: son allure, sa vivacité, son charisme et son humour attirant autour d'elle une cour d'admirateurs dévoués des deux sexes et ceci jusqu'à sa mort].. cette jeune fille dont à la fin on ne savait plus rien, petit Poucet laissé dans les bois, perdu, maiscette fois définitivement. Mieux vaut socialement avouer [ou plus exactementinventer] une nièce dérangée, droguée et hors-la-loi, ça arrive dans les meilleures familles, qu'un père indigne, peut-être violeur incestueux. Fin de l'histoire. Léna n'apprit sa mort que longtemps après celle-ci, par hasard. Le sacrifice d'Iphigénie.C'est pour elle que ceci est écrit.

Transfert


Or cette volée contre Anita fut exactement identique à celle que subit Léna lorsqu'elle aussi parla de son cas [dérisoire]. Mais si elle ne fut pas réellement affectée par la lettre, la disproportion de forces jouant ici largement en sa faveur, pour Anita, ce nième rejet l'anéantit: éreintée de toutes parts y compris par sa propre famille retrouvée depuis peu, y compris par une tante innocente qui au lieu de faire tampon, s'alignant devant le plus fort, l'accablait violemment, non défendue ou mal, elle dériva jusqu'à sa fin prévisible, dans l'indifférence complète de toute sa lignée et indirectement de toute une famille d'alliance courageuse, honorable mais manipulée.

Les séquelles de viols ou d'agressions sexuelles peuvent perdurer et mêmes'amplifier très longtemps après y compris chez les enfants des agressés ou maltraités, dégâts collatéraux, surtout s'ils se trouvent confrontés à des syndromes de Stockholm qui les précipitent dans le gouffre.

Les responsables? Le violeur [ou "simple" père indigne] évidemment qui ne fut jamais inquiété si ce n'est par la rumeur insistante jamais suivie de dénonciation franche, mais aussi Adèle qui l'aida largement à détruire sa dernière victime. [Mais la jeune fille, le connaissant à peine et n'éprouvant nulle affection pour lui, aguerrie par son passé, sut se défendre mieux que sa mère: elle le dénonça, parla à tous et, après un épisode plus hard où il aurait tenté de la coincer dans un couloir, refusa sans appel de le revoir.] On aurait pu penser que celle-ci ayant réglé ses comptes, d'elle-même .. [et suscité son bras armé, Léna, qui allait demeurer en lice sabre au clair même après sa disparition].. ensuite liée à un compagnon plus âgé vivant dans les bois par sa profession, s'en était tirée: par la fuite. Ce ne fut pas le cas.

Une famille modèle -presque- ouvrière, catholique et travailleuse, extrêmement soucieuse d'ascension sociale dont Adèle, bien mariée pour leur plus grande fierté était le fleuron. Une observation : le fait, dans l'enfance d'avoir subi ou seulement été témoin impuissant de violence sexuelles ou autres suffit à faire de l'enfant et même de sa descendance une victime par procuration avec les séquelles souvent identiques ou pires que celles des agressés directs. Cela m'a été signalé par plusieurs lecteurs (de "Secret de famille"), les enfants sont parfois encore plus atteints que les parents.Un agresseur sexuel, violeur [ou seulement père indigne] ne détruit donc pas seulement une victime mais une lignée, fratrie et descendance.

Jean-Louis, un passé ignoré venu de loin

C'est le cas probable du père de Léna -ici milieu intello-bourgeois-artiste- qui avait vu une de ses sœurs, Tania -à laquelle Léna ressemblait- menacer leur jeune beau-père qui tentait de la peloter ou pire.. Elle se maria rapidement peu après, quittadéfinitivement sa famille et même son pays.. et quarante ans plus tard, le frère-témoin eut ce geste contre.. l'image de Tania, sa propre fille. Non, on n'oublie pas. Notons que de tels comportements autrefois étaient quasiment tolérés et que sur ce plan, le droit des femmes a nettement évolué -en Occident du moins-; ainsi, c'est par une ex employée de maison de sa grand-mère... qui n'eut à aucun moment l'impression de trahir un secret, de dévoiler un crime ou au moins un acte gravement délictuel (!) que Léna apprit le passé de son père et de sa fratrie : la vieille dame souriante glissa au passage, simplement à titre d'exemple, au milieu d'un long panégyrique sur Tania dont elle s'était beaucoup occupée ["une jeune fille si jolie, si élégante, mais qui savait se faire respecter et sportive avec ça" -elle avait envoyé sa brosse à la figure de son agresseur et brandissait à toutes fins utiles un lourd miroir-]... que "avec Sandro -le mari de la grand mère de Léna- ce n'était pas la première fois, il était 'comme ça', ah, les hommes.. (!) mais c'était surtout quand il avait bu, autrement, impeccable.. et Tania était une si belle fille, tu lui ressembles beaucoup mais tu es un peu plus grande etc..." (!) Sur cet exemple un peu en digression et pour elle sans réel intérêt, la vieille dame fut étonnée et un peu choquée que Léna s'attardât autant, réclamant des précisions et des précisions... "Oui, il était "comme ça"... il faut dire qu'il avait 18 ans de moins que ta grand-mère et, même si elle était très belle, forcément... oui peut-être aussi avec Sophie.. je ne sais pas.. mais c'est vieux.. tu m'agaces etc" -cette tante avait accusé son jeune beau-père des mêmes gestes et Léna, suivant en cela sa mère qui le lui avait rapporté -parce qu'elle supposait que Sophie lui avait parlé, ce qui était le cas- ne le croyait pas ou pensait qu'elle exagérait : faux ! donc Sophie, souvent accusée à mi mot d'être "semeuse de discorde", Sophie avait raison.
Il faut noter aussi que les agresseurs sexuels peuvent ensuite vivre un calvaire, ce fut le cas ici, leur respectabilité étant à la merci de leur victime, d'où une haine renforcée reliée à la peur qu'elle ne parle et la haine réciproque de celle-ci qui peut aussi en jouer. Ou le meurtre dans certains cas. Réel ou symbolique [l'exclusion, comme dans le cas d'Anita]. Ambiance.

Les sacrifiés

*Beaucoup de parents d'enfants "maltraités sexuellement" [le mot "abusé" est impropre] ou seulement maltraités tendent à leur interdire toute étude ou en règle générale tout ce qui pourrait les renforcer... par égoïsme, désamour ou peut-êtreméfiance, au cas improbable où ceux-ci voudraient plus tard les dénoncer, afin de les discréditer par avance. La parole d'un agrégé de maths est plus tenue en compte que celle d'une prostituée ou d'un enfant de la DDASS alcoolique, et la candeur, souvent prégnante chez les inéduqués les rend parfois malhabiles, peu crédibles ; leurs propos et leurs réactions déroutent.. ce qui les isole, et suscite ou renforce le syndrome de Stockholm, plus fréquent et plus grave dit-on chez ceux-ci [ce point, discutable, n'est pas toujours admis]. Enfin, porter plainte leur vient rarement à l'esprit. Sans argent, ils n'ont pas accès, pensent-ils, à la justice, ce qui n'est pas totalement faux. Qui va les défendre croient-ils, puisque personne ne les a jamais défendus? Ils ont en général perdu toute confiance en la société, tout espoir ("tous des salauds") et peuvent inclure dans leur ire même ceux qui ne la méritent pas voire qui cherchent à les aider. De fait, malgré sa haine, Anita qui aurait pu porter l'affaire en justice ne l'a pas fait. Note: sa mère ne fut jamais retrouvée.

Adèle, elle aussi une victime pourtant

Manipulatrice sordide mais d'une malhabileté poignante, elle était au fond, et bien plus que Léna qui elle s'était révoltée efficacement, une victime marquée par un passé incommensurablement plus difficile qu'elle n'avait jamais pu liquider [plus les faits sont effroyables, plus les victimes sont anéanties et plus le syndrome de Stockholm est prégnant, cercle vicieux].. Sympathique "vu du ciel", odieuse "vu de la terre", héroïquement loyale d'un côté, Merteuil de l'autre, comme tous les SDS, c'est un personnage déchiré qui porte lui-même le poids d'un crime qu'il n'a pas commis, un crime contre lui et contre d'autres, n'ayant pas compris qu'il devait choisir son camp quels que soient les dégâts qui risquaient de s'ensuivre, de toutes manières moindres que ceux qu'il occasionne par sa forfaiture [des dégâts contre les doleurs contre des dégâts contre leurs victimes, hélas, il choisit les seconds]. Voilà pourquoi il FAUT parler.. et pourquoi cela est si difficile. Se heurter comme Léna lorsqu'elle lève l'omerta à quelqu'un qui, en réponse, l'accable avec une telle cruauté -une victime pourtant et d'une dimension incommensurable- est un risque qu'il faut connaitre mais courir tout de même. Inattendu? Peut-être ici le cas est-il extrême [mais les témoignages d'épisodes du même ordre sont nombreux, cf l'affaire de Villiers].. extrême et en effet inattendu, curieux, parce que Léna n'est pas attaquée PAR SA PROPRE FAMILLE -elle ne le sera jamais- mais.. par une out sider qui se fait la séide d'un homme qu'elle connaissait peu -et qui, sis à ses antipodes culturels, se souciait peu de frayer avec elle-.. Léna donc est attaquée par quelqu'un qui à la limite n'était pas a priori concernée -sa lettre n'était pas adressée à Adèle-. Il faut le savoir : cela arrive.. et en un sens c'est plus lourd qu'affronter un doleur armes à la main. Mais la plupart du temps, c'est la propre famille de l'agressé qui se ligue contre lui pour le dézinguer (cas de Villiers) : les agresseurs savent jouer de leur force -avec leurs proies-, puis recruter des séides [ou des protecteurs] (1) et ensuite,longtemps après, des nurses, arguant cette fois de leur âge, faiblesse, utilisant l'une contre l'autre ou l'oubli surtout s'ils sont vieux. Eux aussi sont des Janus.. et parfois, côté jardin, indiscutablement bons types. Il n'empêche que ce système de victime-kapos-"privilèges" (diviser pour régner, faire exécuter par une victime les basses œuvres qu'on refuse d'accomplir soi-même) s'apparente à celui des goulags et en général des camps ou prisons totalitaires: il s'agit pour le bourreau d'avilir sa victime, de la rendre complice puis actrice et enfin premier rôle.. afin de s'assurer de son silence, si bien qu'on s'y perd un peu, c'est le but. Victime? Complice? Les deux -oui-? Initiatrice -si elle est particulièrement zélée-? Bourrelle? L'amour pour le doleur n'est pas forcément à la clef d'un SDS (encore que certain/es détenues puissent être fascinées par les maton/nes). La soumission suffit. La peur. Avec ou sans objet. En lisant la "lettre" de Nadedja Tolonnika sur le goulag, c'est ce processus bien rodé que l'on voit à l’œuvre (toute détenue qui a le malheur de devenir son amie sera sanctionnée plus durement qu'elle-même, si bien que personne n'osera s'approcher d'elle, et a contrario certaines plus "fiables" seront diligentées contre elle avec promesses de meilleur traitement en récompense).. processus qui n'est rien d'autre que l'application à vaste échelle de celui qui pousse Adèle à dézinguer sa soeur, sa nièce, puis Léna qui s'est positionnée... en faisant porter la charge à David puis à son fils (lien.) L'aliénation, le SDS est pire dans le cas d'un groupe familial car il n'y a même pas de gratification à la clef : le SDS fait ça gratos, il a véritablement intériorisé la personnalité du doleur (voire des doleurs en général) et fonctionne comme lui, pour lui : il EST lui.   

Voilà pourquoi il faut parler, ester. Même 30 ans après. Même si comme Llena on y perd sa maison. Elle n'ose plus y aller depuis.

(1) Cf le cas "de Villiers"... de Villiers qui, pour l'"honneur" de la famille (!) prend le parti de son fils violeur contre le cadet sa victime, entraînant avec lui tout le clan terrorisé qui pourtant s'en ignore rien (!) .. sauf une cousine, seule à soutenir le jeune homme, bien que -elle l'avoue- elle aussi fût effrayée par les menaces -suivies- d'effets du "chef"..
.
Les responsables; un sinistre engrenage

Question : si Anita avait porté plainte, si Léna le lui avait conseillé [elle ne le fit pas] si elle avait été entendue [quelque soit le résultat] serait-elle toujours en vie? Peut-être. La famille [d'Adèle] eût éclaté sans doute, le père aurait été inquiété, peut-être condamné, certes des innocents auraient été marqués, mais sa vie en valait la peine. Un gâchis dont les responsables dans l'ordre sont:
1 le père;
2 la mère fervente catholique qui laissa faire;
3 Adèle qui accabla une victime, puis une autre;
4 la DDASS qui confia Anita à de multiples familles sans contrôle;
5 ces familles plus soucieuse de l'argent qu'elle rapportait que d'elle;
6 l'entourage [le village] qui parla mais ne fit pas de signalement;
7 la famille d'alliance d'Adèle qui n'osa pas prendre parti;
8 les inégalités sociales vis à vis des immigrés surexploités;
9 la religion catholique mal comprise;
10 la société bourgeoise qui terrorise ses affidés un peu courts;
11 l'éducation nationale qui ne sut pas s'imposer aux parents et voua les deux filles à une vie diminuée et dramatique;
12 Léna qui retrouva Anita et lui donna de vains espoirs.
Un sinistre engrenage dans lequel Anita et sa mère furent broyées.

Bilan :

1 la famille, travailleuse, économe et habile à obtenir quelques faveurs de hiérarques, prospéra considérablement;
2 le père mourut en patriarche, apprécié par tous, modèle de réussite et d'intégration cité au tableau d'honneur;
3 Adèle demeura plus ou moins la bourgeoise qu'elle rêvait d'être, certes avec quelques couacs; David se détacha d'elle, sans divorcer -l'essentiel- et se rapprocha de Léna*.
4 Sonia, la mère d'Anita, demeura prostituée et on ne retrouva jamais sa trace;
5 Anita se suicida (à l'alcool).
6 Léna continua sa carrière d'écrivain, pensant souvent à Anita, la jeune morte qui les avait tellement impressionnés durant le peu de temps qu'ils l'avaient côtoyée.

*Ce qui généra quelque temps après une violente intrusion d'Adèle ET de son fils briefé contre Léna, chez celle-ci, avec diverses accusations (le coup de la lettre éventé, le masque tombe) sans doute sincères (?) de la part du jeune homme... qui PRÉTENDIT IGNORER TOUT DE L'HISTOIRE... UNE HISTOIRE QUI CEPENDANT S’ÉTAIT DÉROULÉE SOUS SES YEUX (!) cas classique d'un déni ici phénoménal... au point que Léna dut faire intervenir la police pour les faire sortir. Notons ici qu'Adèle a apparemment transmis elle aussi à son fils son propre déni ainsi que les traumatismes qu'elle a subi, (cas classique) et que selon son habitude, (cas particulier?) n'osant elle-même affronter Léna, elle l'en a chargé (un séide relativement innocent donnant plus de poids à ses accusations) tout comme elle avait été la kapo de son père contre Anita. Histoires en boucle, les SDS aussi se transmettent. Notons aussi que l'agressivité inouïe (selon le personnage qu'elle s'était construit et qui, maladroitement ravaudé pour l'extérieur, tenait encore -presque- la route) dont elle fit preuve envers Léna, violant son domicile au forcing, cessa immédiatement lorsque les policiers arrivèrent : le personnage se transforma immédiatement en une dame calme et étonnée qui "ne comprenait pas pourquoi Léna s'énervait" (même processus que celui dont elle avait usé contre Anita devant Léna, la feinte naïveté).. et enfin.. que David ne FIT RIEN POUR EMPÊCHER L'INTRUSION ET DÉFENDRE LENA. Quelque soit l'amour qu'il éprouvait pour son aînée, c'est tout de même elle qu'il laissa (et qu'il avait indirectement lancée) au front sans broncher... ce qui ne l'empêcha nullement de revenir ensuite vers elle comme si rien ne s'était passé. Le lendemain, tout était "oublié" (pour lui.. si ce n'est des traces profondes de griffures sur les bras.) Note : parmi les accusations insinuées (par le fils d'Adèle cette fois, en écho de celle-ci) contre Léna.. il y avait celle.. d'inceste (entre elle et David).. un transfert parfait. [Léna partit. C'était sans doute le but.] Ou comment en voulant s'interposer entre une victime intra familiale et ses bourreaux, on court le risque .. de le devenir soi même -ici moindrement-.. même des années après. Malheur à celui par qui le scandale arrive? Non : à celui qui le dévoile, fût ce a minima. Peut-on alors s'étonner et blâmer la "passivité" des témoins, voisins, membre directs ou indirects de l'entourage familial? Il n'empêche : il faut se lever tout de même, quels que soient les risques. Les droits de l'homme -et surtout des femmes-, les viols.. c'est en Centrafrique, au Congo certes... mais aussi sur le palier d'à côté et c'est le silence de tous qui permet qu'ils perdurent et suscitent des émules.

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